L'exil
L'horloge a l'iris blanc
Sur le plancher flétri
Sans parent, sans patrie
J'ai seize ans, sur mon siège
Je me branle, secret
Devant la Sainte-Vierge
Mais les vautours de la cité
Tirant mon bout vers les godailles
Me traitent tantôt de canaille
Tantôt de canard tartignole
Un doigt pointant le ciel, ils ont
Comme un vrai maintien de guignol
Ils m'emportent! Nu, dans les ronces
Plus je me débats, plus je saigne
Et s'il faut user des rengaines,
Pour s'ôter proprement l'épine
Misère! Je ne les sais pas
Puisque j’exècre vos contines
Pourtant voyez comme je vole
Comme j'éclabousse mon sang
Loin de tout, sur la mer d'argent
Voyez comme les tons se mêlent
Comme l'estran livre si peu
De mes pratiques maritimes
Puis, rendu au sol, fourbe
Je noie les cœurs qui me sont chers
Je sens frémir la vieille terre
Et marche alors dans les mirages
Car je n'ai pu trouver l'exil
Tant rêvé, que sur cette page.
L'horloge a ses dessins
Sur le plancher en fleur
Sans pays, sans aigreur
J'ai vingt ans, et je vis
L'amour, chaque seconde
Avec la poésie.